5.   Les échecs et les erreurs ne sont pas condamnables

 

   Les échecs, les erreurs ne sont pas condamnables, loin de là, elles font partie de la formation, des apprentissages. On peut toujours rejaillir après un ou plusieurs échecs, une ou plusieurs erreurs. Ils servent à progresser, à mûrir, à condition de ne pas rester inerte. Ce sera parfois difficile, on sera souvent découragé, mais il faudra s’accrocher. Les parents doivent remarquer les efforts des enfants, les féliciter et les encourager ! Qu’ils aillent dans le sens des enfants « Bravo, tu n’as pas peur de t’attaquer à quelque chose de nouveau, c’était pourtant difficile, tu as souffert, mais tu as bien avancé, encore une fois bravo ! ». Ainsi armés, les enfants seront prêts pour de nouvelles tentatives.

   Le 12 octobre 1492, Christophe Colomb arrive aux Bahamas, dans le continent américain. Il avait pris la mer pour ouvrir une nouvelle route commerciale vers l’Asie, plus précisément, vers les Indes. Il pensait la trouver en navigant vers l’ouest, c’est-à-dire en suivant le soleil, du lever vers le coucher. Ce sera une erreur. Mais quelle erreur, il venait de découvrir un nouveau continent ! Plus tard, on saura que d’autres européens étaient déjà allés en Amérique. Voilà une erreur qui a entrainé des conséquences imprévisibles : la découverte d’un nouveau monde, pour le meilleur et pour le pire. Cette erreur est-elle condamnable ?

   Le milliardaire Elon Musk a des idées originales. Pourrait-il découvrir un nouveau monde parmi les innombrables planètes, quitte à faire une nouvelle erreur ?

   Un autre exemple célèbre chez les mathématiciens professionnels. Pour le comprendre, il faut connaître la différence entre théorèmes et conjectures :

   Un théorème ressemble à cette phrase : « Ceci est vrai entraîne Cela est vrai » ou bien  « Je suis sûr que si ceci est vrai alors cela est vrai ». « ceci » contient la liste de toutes les hypothèses, « cela » contient la liste de toutes les conclusions. « Je suis sûr » signifie que j’ai une démonstration de ce que j’affirme. L’auteur d’un théorème doit rendre publique la démonstration et son identification.

   Une conjecture ressemble à cette phrase : « Je crois que si ceci est vrai alors cela est vrai ». « Je crois que » signifie que je ne suis pas capable de vous fournir une démonstration. Chez les chercheurs, l’auteur de la conjecture doit absolument s’identifier. Nous sommes loin des « Fakes News » des réseaux sociaux, où l’on peut dire n’importe quoi sans démonstration, sans preuve, avec une signature anonyme, un pseudo nom qui n’identifie personne.

   Pour simplifier, nous allons présenter un cas particulier de la conjecture d’un mathématicien français (et juriste) très célèbre Pierre de Fermat, elle a été énoncée en 1641 !

   Dans les hypothèses, nous prenons 3 nombres entiers, positifs (non nuls) quelconques : x, y, z.

   Dans les conclusions, nous utilisons une notation mathématique simple : x3 = x.x.x (x est multiplié par lui-même 3 fois, on dit x puissance 3) et la même chose pour y et pour z.

   Voici la conclusion : x3 + y3 ≠ zce qui se prononce : x3 + y3 est différent de z3

  C’était une conjecture parce que Fermat n’a pas fourni une démonstration. Fermat a simplement écrit sur la marge d’un livre qu’il traduisait : « J'en ai découvert une démonstration véritablement merveilleuse que cette marge est trop étroite pour la contenir ». Personne n’a retrouvé cette démonstration merveilleuse ! C’est donc une conjecture.

   Sur le timbre, « n » est un nombre entier supérieur ou égal à 3. C’est la conjecture dans toute sa généralité.

   Bien sûr, de nombreux mathématiciens ont essayé de trouver une démonstration : échecs pendant plus de 3 siècles ! Mais, un anglais du nom d’Andrew Wiles décide de se retirer du monde pour s’attaquer à cette conjecture. Après 8 ans d’efforts, il propose une démonstration en Juin 1993 (à rapprocher de 1641, date de la conjecture).

   Hélas, lors d’une ultime vérification avant publication, un lecteur trouve une lacune, disons une insuffisance dans la démonstration.

   Avec l'aide de Richard Taylor, Wiles réussit à contourner l’obstacle, en octobre 1994. Cette fois, tous les « correcteurs » avalisent la démonstration. La recherche de la solution de la conjecture de Fermat a duré plus de 300 ans. Bravo Monsieur Wiles ! Mais, malheureusement pour lui, il a dépassé l’âge de 40 ans, dans ces conditions, il ne pourra pas recevoir la médaille Fields (le prix Nobel des mathématiciens).

   Ainsi, même les plus grands mathématiciens connaissent des échecs, font des erreurs. Mais, petit à petit, ils avancent, ils trouvent des choses ! Il faut expliquer aux parents ce qu’est le travail d’un chercheur. Il faut qu’ils sachent qu’un chercheur peut passer pas mal de temps sans rien trouver ! Mais, il avance quand même car il essaie plusieurs voies ce faisant il apprend des nouveautés, il s’enrichit culturellement. En frappant à toutes les portes, un jour, une porte finit par s’ouvrir. Stupéfaction des parents qui s’imaginent qu’un chercheur trouve toujours la solution à son problème.

   Selon Ken Robinson : « Si vous n’êtes pas prêt à vous tromper, vous ne sortirez rien d’original ». Autrement dit, l’erreur n’est pas loin de l’innovation ! Respectons les erreurs, applaudissons le travail. Bill Gates ajoute : « La seule chose qui freine l’innovation en France, c’est la peur de l’échec. »

   Insistons sur les affirmations « l’erreur aide à progresser, l’erreur est un apprentissage ». Si l’enfant est amorphe devant une erreur, autrement dit s’il n’y a aucun retour sur erreur qui oblige le cerveau de l’enfant à se poser des questions sur son raisonnement, il ne se passera rien. Par contre, s’il y a un retour sur erreur, une analyse de l’erreur, regardons comment les choses se passent. Une démonstration logique (un théorème) est une suite d’affirmations du type « Ceci entraîne Cela ». Vous parcourrez le raisonnement qui a conduit à une erreur, vous retrouvez de nombreux « Ceci entraine Cela » corrects, mais à un moment donné, vous finissez par trouver un « Ceci entraine Cela » qui est faux. Stop erreur. Où en est-on ? Vous avez revu de nombreux « Ceci entraîne Cela » corrects, c’est important car il se produit un renforcement de vos connaissances. Et de plus, vous savez que votre dernier « Ceci entraine Cela » est incorrect, donc vous venez d’apprendre quelque chose de nouveau, aussi important qu’un « Ceci entraine Cela » correct. Votre esprit s’est enrichi. Grace au retour sur erreur. Donc, chaque fois que vous constatez une erreur dans votre raisonnement, vous devez analyser la situation pour expliciter le point précis qui fait erreur.

   En conclusion, en cas d’erreur, il faut éviter toute culpabilité, la honte, les récriminations, les réactions négatives. Il faut au contraire tout transformer en positif. Et faire un retour sur erreur.